flûte, clarinette, piano, percussions, violon, alto et violoncelle
«Je ne peins pas pour être compris mais ai souhaité démontrer ce qu’une telle scène pou-vait évoquer.» (J.M.W. Turner)
Interior at Petworth, le tableau le plus mystérieux de Turner, a fasciné plusieurs géné-rations: personne ne parvenait à dire avec certitude ce qui y était représenté, dans une époque où la peinture abstraite ou non figurative était encore inimaginable. La seule certitude face à ce tableau concerne son contexte de création: il a été peint à la propriété d’un ami, George Wyndham, décédé avant qu’il ne soit achevé. La toile est alors souvent interprétée comme une sorte d’adieu à un être aimé autant qu’à la résidence où il l’accueillit et qu’il devait alors quitter, le domaine de Petworth. Interior at Petworth est un espace sans limites, une collection d’objets reconnaissables qui, dans leur arrangement, brisent le moule du reconnaissable.
En un certain sens, mes 8 Variations on a Picture of J.M.W. Turner sont une expression de mon mécontentement croissant face aux genres de plus en plus «auto-référentiels» de la «nouvelle musique». Elles expriment mon ennui face aux œuvres qui laissent deviner leur évolution et leur fin dès le départ, en manquant la plupart du temps de vitalité et de liberté. Mon œuvre s’exprime plutôt en faveur d’une certaine indétermination, tout en considérant que l’abolition des barrières n’est réellement possible qu’à l’intérieur de limites reconnaissables. Interior at Petworth est un interieur, certes, mais ouvert vers l’extérieur.
Interior at Petworth n’est pas une pièce intentionnellement énigmatique: tout y est présenté de manière extrêmement ouverte et transparente. Or, elle renonce à toute signification prédéfinie: on y trouve des variations, mais pas de thème. L’œuvre brise sans cesse les règles prescrites par une composition «correcte», explorant les limites du sens lui-même. L’adieu qu’est le tableau de Turner révèle dès lors, outre une certaine tristesse, l’espoir d’un recommencement: derrière le cercueil ouvert brille la lumière vive d’un univers sans limites.
Moritz Eggert, 2005 [traduction française: N Pascal]
Exécution
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Mercredi 7 mars 2007