8 musiciens

La composition de Las siete vidas de un gato (les sept vies d’un chat), contrepoint musical à Un Chien andalou, est le second «commentaire cinématographique» de Martin Matalon. L’annihilation de tout élément narratif du film de Buñuel a permis au compositeur une relation d’une grande liberté avec l’image. Malgré son autonomie par rapport à ce qui se passe sur l’écran, il existe un certain nombre d’interférences entre elle et le film: par exemple, l’ajout, à l’extrême densité de cette oeuvre cinématographique très brève, d’une densité musicale équivalente, le ton général de l’œuvre, suggéré par la crudité, l’ironie et l’irrationalité des images; enfin, l’adoption par la musique du montage très rapide, dont la plupart des plans ne dépassent pas les trois ou quatre secondes.

La partition débute par une sorte de cortège défilant en cahotant sur des polyrythmies. Ponctué quasi militairement par la caisse claire et dans le grouillement des percussions, il est mené par un violon scandant la marche de glissandi, par une trompette coassante et par un violoncelle répétant un objet avec l’obstination d’un disque rayé. Isolés dans la trame polyrythmique, aucun des instruments ne paraît écouter l’autre et semblent fixés dans quelque geste élémentaire et obsessionnel. Le piano, qui traverse le cortège en diagonale, est quant à lui libre de toute contrainte rythmique, ce qui lui confère un caractère sauvage et irrationnel.

Les «personnages» de Buñuel sont hors narration, hors temps, hors psychologie. Par contraste, ceux de Martin Matalon sont comme des «précipités»: violon chaviré, trompette histrionique, clarinette prolixe… La scansion et la trépidation rythmiques vont jusqu’à la surchauffe. Après une brève intervention des instruments résonnants, la pièce finit en se «dégonflant» dans une brusque chute de tension.

Exécution