clavier maître MIDI

Le «regio dissimilitudinis» d’Augustin, qui s’est inspiré notamment des écrits de Platon via Plotin, fait référence à la «défiguration» de la figure humaine et à sa menace de décomposition. Cette impureté liée au caractère matériel de l’être humain se confond chez Augustin avec le concept de péché originel: nous voulons savoir mais nous n’en avons pas la permission. Nous ne pouvons que faire quelques pas de géant vers la connaissance, mais sans jamais l’atteindre.

Imaginons le vœu d’un compositeur de trouver ce chemin par la voie de l’intonation juste. Au moment de travailler avec des intervalles justes, il devient nécessaire de se limiter à un certain registre: il faut alors soit se résigner à travailler avec un nombre d’intervalles particulièrement réduit — les tierces, quintes, septièmes justes, etc. — ou soit faire comme Harry Partch, qui a défini 43 hauteurs par octave. Mais même avec la limitation à 43 hauteurs, le nombre d’intervalles est énorme: des intervalles incroyablement petits surviennent, et l’ensemble de ces hauteurs est complètement asymétrique et non intuitif. En définitive, l’aequiformitas du paradis se perd.

Partota 8 essaie plutôt d’utiliser des ensembles de hauteurs non définies: l’œuvre multiplie les accords joués sur le Disklavier selon la «différence de timbre cubique» (cubic difference-tone) qui survient dans l’oreille interne au moment d’entendre un intervalle. Nous pourrions penser à la base à un intervalle premier comme la seconde majeure (9/8 dans les pro-portions justes), et les hauteurs secondaires baissées conformément à la cascade de la différence de timbre cubique (qui en réalité n’est pas une hauteur unique!): 7, 6, 5… Le plus loin elles sont du ton premier, le plus doux ces hauteurs ajoutées vont sonner. Si on a des intervalles premiers plus complexes comme 19/16, on va avoir 13,10,7… J’ai calculé 65 de ces accords. Certains ressemblent fortement à des accords connus, d’autres très étrangers.

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Exécution