4 saxophones et 4 percussions
Commande: Société Radio-Canada (SRC)
Création: 17 novembre 2003, Sax, tambours et cie, Salle Pierre-Mercure — Centre Pierre-Péladeau, Montréal (Québec)
Prélude express — Contrepoint I — Interlude I — Dialogue I (à deux) — Interlude II —Mens insana in corpore solo — Interlude III — Dialogue II (à quatre) — Puzzle I — Rock Fiesta — Interlude IV — Chant d’amour —Interlude V — Dialogue III (à huit) — Contrepoint II — Puzzle II — Postlude
Telle qu’orthographiée ici, la syllabe qua présente deux prononciations possibles.
1e [ka]. Comme dans quatre, cacophonie ou «quarte»: c’est là l’intervalle sur lequel repose l’essentiel de la structure harmonique et mélodique de cette «toune» énergique. Le morphème [ka] est aussi fort utile aux musiciens qui pratiquent le solfège rythmique à un tempo requérant une double articulation (ta-ka-ta-ka…). Et dans cette partition, c’est souvent le… cas!
2e [kwa]. Comme dans Quad, Quasar et quatuor, évidemment. Mais surtout, ce morphème correspond au pronom interrogatif quoi. Cela nous amène au cœur du propos de Qua?.
Par nature, l’Homme cherche à communiquer avec l’Autre. Hélas! la communication est chose imparfaite: souvent, on ne se comprend qu’à moitié, voire pas du tout. Un esprit éveillé soupçonnera qu’il a peut-être mal compris et posera alors la question fondamentale: Quoi? Si tout se passe bien, les interlocuteurs auront finalement appris quelque chose. Si, au contraire, ce Quoi? est tu, jamais on ne saura qui a compris quoi. Ce qui n’est, du reste, pas plus mal…
Prenez ma musique. En la composant, (quoiqu’en ait dit Igor S., au siècle dernier) j’exprime fatalement quelque chose – ne fût-ce que ma vacuité. De même, vous ressentez quelque chose en l’écoutant – ne fût-ce que de l’indifférence. Le lien entre ces deux phénomènes est difficile à définir, si tant est qu’il existe. Qui peut prétendre connaître la signification d’un accord, d’un rythme, d’une mélodie? Je ne peux donc présumer de ce que ma musique vous dira. Pourtant, lorsque les musiciens s’exécutent, quelque chose passe, par eux, de vous à moi. Entre mon lobe frontal et votre hypothalamus, ce «quelque chose» a subi d’imprévisibles métamorphoses sémantiques. D’aucuns se désoleraient de ce téléphone arabe. Moi, je m’en réjouis. Et j’appelle cela: magie de la musique. Finalement, les «musagnostiques», qui ne carburent qu’au «vérifiable», peuvent consulter le plan général de Qua, inscrit au début de ce texte!
Vincent Collard
Exécution
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Lundi 17 novembre 2003